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L'imputation des crédits d'impôt conventionnels attachés aux dividendes étrangers dans le régime mère-fille.

Yanis GANDRILLON

14 avr. 2023

Droit fiscal

Dans une décision du 7 avril 2023 (CE, 9e et 10e chambres réunies, 7 avril 2023, n° 462709), le Conseil d’Etat est venu préciser les modalités d’imputation des crédits d’impôt conventionnels attachés aux versements de dividendes étrangers sur la quote-part de frais et charges du régime mère-fille.



En France, le régime mère-fille instauré aux articles 145 et 216 du CGI prévoit que les dividendes perçus par une société mère en provenance d’une filiale dont elle détient au moins 5 % du capital sont exonérés d’impôt sur les sociétés (IS), sous réserve de la réintégration d’une quote-part de frais et charges (QPFC) fixée forfaitairement à 5 % du montant brut des dividendes versés.



Dans une précédente décision de juillet 2022 (CE, 3e et 8e chambres réunies, 5 juillet 2022, n° 463021), le Conseil d’Etat avait retenu que, lorsque le montant des frais réellement supportés pour la perception des dividendes par la société bénéficiaire de ceux-ci était inférieur au montant forfaitaire de la QPFC, cette QPFC de 5 % ne pouvait être considérée comme un simple refus de déductibilité de frais réellement supportés mais devait au contraire être regardée comme visant à soumettre à l'IS une fraction des dividendes bénéficiant du régime mère-fille.


La principale conséquence de cette qualification était la possibilité offerte à la société française ayant perçu des dividendes étrangers d’imputer sur le montant de son IS le CI conventionnellement prévu dans la convention fiscale liant la France à l’Etat de la société ayant versé les dividendes, et ce dans la limite de la fraction de l’IS français correspondant à l’imposition de ces dividendes.



La règle dite « du butoir », résultant d’une lecture combinée de l'article 220, 1., b) du CGI et des stipulations la convention fiscale applicable, prévoit que l'imputation du CI étranger sur l'IS dû en France est limitée à la fraction de cet impôt correspondant aux dividendes ayant donné lieu au CI, de sorte que l’excédent n'est ni remboursable ni reportable.


L’enjeu était donc de déterminer la fraction de l’IS français correspondant à l’imposition des dividendes étrangers, afin de déterminer la base d’imputation maximale du CI étranger associé.



Le Conseil d’Etat n’avait néanmoins pas précisé sur quelle fraction de la QPFC portait cette imposition, de sorte que la Cour administrative d’appel de Lyon (CAA de Lyon, 2e chambre, 27 janvier 2022, n° 20LY00698) avait pu considérer que la soumission à l’IS de la QPFC de 5 % s’analysait comme une modalité d'imposition de l'ensemble des dividendes en France, conduisant ainsi à retenir une base d’imputation élargie du CI étranger.

Ainsi, un dividende étranger de 200K € était soumis à l’IS français pour un montant de 200 * 5 % (QPFC) * 25 % (taux de l’IS), soit pour un montant de 2,5K € qui constituait ainsi la base d’imputation du CI étranger.



Néanmoins, dans sa présente décision, rendue sur pourvoi formé contre l’arrêt de la CAA de Lyon, le Conseil d’Etat estime au contraire que cette imposition ne porte que sur la fraction de la QPFC forfaitaire excédant le montant des frais réellement exposés par la société française pour l’acquisition ou la conservation desdits dividendes.


Ainsi, pour reprendre l’exemple précédent, et dans le cas où les frais réellement exposés par la société française pour l’acquisition ou la conservation du dividende étranger s’élèvent à 1K €, la base d’imputation du CI étranger s’élève alors à (200K € * 5 % - 1K €) * 25 %, soit une base d’imputation du CI étranger réduite à 2.25K €.



Par la présente solution, le Conseil d’Etat a donc entendu limiter les nouvelles possibilités d’imputation des CI étrangers liées à la requalification de la QPFC de 5 % du régime mère-fille en imposition en limitant la base d’imputation de ces CI à l’IS dû sur la fraction de la QPFC excédant les frais réellement supportés par la société ayant perçus les dividendes.


La fraction du CI étranger excédant la base d’imputation ainsi définie n’est ni remboursable ni reportable sur les exercices suivants, et est donc définitivement perdue par application de la règle du butoir.

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