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Bail commercial non renouvelé : quelles conditions pour percevoir une indemnité d'éviction ?

Yanis GANDRILLON

30 juin 2023

Droit des sociétés

En vertu de l’article L. 145-14 du Code de commerce, le bailleur qui ne justifie pas de l'un des motifs autorisés par l'article L. 145-17 du même code doit verser au locataire une indemnité d'éviction qui doit être égale au préjudice causé à celui-ci par le défaut de renouvellement.


Toutefois, aucune indemnité n’est due lorsque le locataire a cessé l’exploitation du fonds antérieurement à la date de la décision de refus de renouvellement.



L'article L. 145-14 du Code de commerce dispose expressément que « le bailleur peut refuser le renouvellement du bail. Toutefois, le bailleur devra, sauf exceptions prévues aux articles L. 145-17 et suivants, payer au locataire évincé une indemnité dite d'éviction égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement ».


En fin de bail, le bailleur dispose donc d'une option lui permettant, soit d'offrir le renouvellement du bail à son locataire, soit de lui refuser le renouvellement et ce, de manière totalement discrétionnaire, à charge cependant en telle hypothèse, de lui payer une indemnité d'éviction, destinée à compenser le préjudice subi par celui-ci du fait du non-renouvellement du bail.



L’indemnité d’éviction doit donc réparer tout le préjudice subi par le locataire évincé (Cass. Civ. 3ème, 7 mai 1969) en même temps que ce préjudice en constitue la limite (Cass. com., 22 mars 1960).


Cette indemnité est fondée sur les éléments du fonds existant à la fin du bail (Cass. civ. 3ème, 14 novembre 1970) et l’article L. 145-14 du Code de commerce énonce en son alinéa 2 qu’elle comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, les frais normaux de déménagement et de réinstallation, les frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur.


Néanmoins, en l'absence de préjudice causé par la décision de non-renouvellement du bail, le locataire ne peut prétendre à aucune indemnité d'éviction.



En ce sens, la Cour de cassation a pu décider que lorsqu’au jour de son départ, le locataire n'exerce plus aucune activité dans les locaux loués et que cette situation ne résulte pas d'une contrainte extérieure, il ne justifie d'aucun préjudice et il perd son droit à indemnité (Cass. civ. 3ème, 10 février 1999, n° 97-16.134).


Dans une autre espèce, la Cour de cassation a pu approuver une cour d’appel d’avoir considéré qu’un locataire n’avait droit à aucune indemnité d’éviction dès lors qu’à la date de décision de non-renouvellement du bail, ce dernier avait déjà vendu ses marchandises et avait totalement cessé son exploitation du fonds en raison d’une procédure de liquidation judiciaire ouverte à son encontre, de sorte que la décision de non-renouvellement ne lui avait causé aucun préjudice (Cass. civ. 3ème, 6 novembre 2001 n° 00-13.943).



De la même manière, le locataire ne pourra prétendre au paiement d'une indemnité d'éviction s'il a cessé toute activité avant la date d'effet du congé du fait de l'incendie ayant endommagé l'immeuble, sans jamais avoir manifesté l'intention de se réinstaller dans un autre local (Cass. civ. 3ème, 23 mai 2012, n° 11-12.214).


Dans cette l'espèce, la Cour de cassation a pu approuver une cour d'appel d’avoir refusé le versement d’une indemnité d’éviction à une société locataire en relevant que cette dernière avait cessé toute activité, avait licencié l'ensemble de son personnel et avait vendu son matériel d'exploitation antérieurement à la décision de non-renouvellement, sans jamais manifester son intention de se réinstaller.



Il ressort donc de ce rapide panorama de jurisprudence qu’en matière de versement de l’indemnité d’éviction pour non-renouvellement d’un bail commercial, telle que prévue par l’article L. 145-45 du Code de commerce, le préjudice réellement subi par le locataire qui voit son bail commercial non renouvelé est la seule mesure de l’indemnité d’éviction à laquelle ce dernier a droit.


Ainsi, dès lors qu’à la date de la décision de non-renouvellement, laquelle peut prendre la forme soit d’un congé donné par le bailleur soit d’une demande de renouvellement signifiée par le locataire et expressément refusée par le bailleur, le locataire avait déjà cessé l’exploitation du fonds, ce dernier ne subi aucun préjudice du fait de cette décision de non-renouvellement et n’a donc droit à aucune indemnité d’éviction au titre de l’article L. 145-14 du Code de commerce.

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