top of page

Absence de clauses abusives pour le maître de l’ouvrage en cas de lien direct avec son activité professionnelle : Une décision de la Cour de Cassation

Karolina MIELCAREK

22 sept. 2023

Droit des contrats

La Cour de cassation, dans son arrêt du 25 mai 2023 (Civ. 3e, n° 21-20.643), a émis une décision majeure concernant les clauses abusives dans les contrats d'architecte, spécifiquement à l'égard des maîtres de l'ouvrage agissant à des fins professionnelles.

 

L'affaire impliquait une société hôtelière agissant en tant que maître d'ouvrage, ayant confié à un architecte la gestion des travaux d'extension. Des retards et des problèmes ont surgi, conduisant le maître d'ouvrage à intenter une action en justice pour obtenir réparation de ses préjudices. L'architecte a invoqué une clause d'exclusion de solidarité dans le contrat pour atténuer sa responsabilité, laquelle clause le dégageait de toute responsabilité solidaire avec d'autres parties en cas de problèmes.

 

La Cour d'appel de Paris (2 juin 2021, n° 18/06191), avait initialement validé cette clause, obligeant ainsi l'architecte à assumer une part proportionnelle des dommages au lieu d'être tenu solidairement responsable. Cependant, le maître d'ouvrage a argué que cette clause créait un déséquilibre significatif entre les droits et les devoirs des parties. Elle permettait, en effet, à l'architecte de limiter sa responsabilité tout en exposant le maître d'ouvrage, qui n'était pas un professionnel, au risque d'insolvabilité des autres parties impliquées.

La question centrale était de déterminer si le statut de professionnel s'appliquait à un cocontractant lorsque ce dernier agissait dans le cadre de son activité professionnelle mais en dehors de son domaine d'expertise.

 

La Cour de cassation en déduit, en reprenant la position exprimée par la Cour d'appel, que « les dispositions de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, selon lesquelles sont réputées non écrites parce qu’abusives les clauses des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, ne s’appliquent pas aux contrats de fourniture de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant ».  Dans cette affaire, le contrat entre le maître d'ouvrage et l'architecte était directement lié à l'activité professionnelle du maître d'ouvrage, car il concernait l'extension de l'hôtel exploité par ce dernier. Par conséquent, le maître d'ouvrage ne pouvait pas être considéré comme un non-professionnel, quelle que soit sa compétence technique en matière de construction. Ainsi, les dispositions relatives aux clauses abusives ne s'appliquent pas dans ce cas précis.

 

En fin de compte, la notion de professionnel doit être interprétée de manière extensive, englobant toute personne agissant à des fins professionnelles, même en dehors de son domaine habituel de compétence. Le critère essentiel est l'intention professionnelle de l'opération envisagée, comme c'était le cas ici, où le maître d'ouvrage était un hôtelier sans expertise spécialisée en construction.

bottom of page